Impôts, mais où va l’argent ?                            


Le 7 mars dernier Vox Nostra a organisé une soirée débat sur le thème « Parlons impôts ».

S’il est ressorti des échanges que le principe de l’imposition est assez unanimement compris comme une des conditions du bon fonctionnement d’une société, il en est tout autrement de l’acceptabilité, laquelle semble avoir atteint ses limites, limites parfois dépassées.

Car la question qui taraudait notre auditoire était mais « où va le pognon ? ». Il s’agit là d’une petite musique qui monte peu à peu dans l’opinion publique, de plus en plus fort, tel le boléro de Ravel, surtout au moment où il est demandé encore des efforts supplémentaires pour financer notre système de retraite.

Le taux de prélèvements obligatoires devrait être de 45,2% du PIB en 2022, soit un des plus élevés au monde ! En 2019, la France comptait 376 impôts et taxes ainsi que 107 cotisations diverses. (1)

En contrepartie, la France est un des pays les plus redistributeurs, par le biais de la fiscalité et des prestations sociales, ce qui atténue fortement les inégalités de niveau de vie. Ainsi en 2020 la redistribution a augmenté de 74% de niveau de vie moyen des 20% de personnes les plus modestes et diminué de 21% celui des 20% les plus aisées faisant passer l’écart entre les deux de 8,6 à 3,9. 

La réduction des écarts est encore plus importante entre les 10% de personnes les plus aisés et les 10% les plus pauvres. Après redistribution l’écart passe de 22,8 à 5,6. (2)

Pourtant la pauvreté reste élevée,(3) les services publics sont à l’agonie (enseignement, justice police, santé), la dette du pays atteint un niveau record de 3 000 Mds€ (un des taux d’endettement les plus élevés de la zone euro).

D’où l’interrogation, mais où va l’argent de nos impôts ? 

Certes il y a eu le quoiqu’il en coûte mais l’endettement de la France n’est pas récent il n’a cessé de s’aggraver depuis des décennies (13,5% du PIB en 1974, 113,7% du PIB au 3ème trimestre 2022 soit 2956,8 Mds€).

Le plus gros poste des dépenses de l’Etat ce sont les dépenses de protection sociale, lesquelles en 2020 représentaient 35% du PIB soit 813 Md€ (809 Md€ en 2019). Or l’impôt représente actuellement presque 40% des recettes de la sécurité sociale (notamment CSG et TVA), les cotisations ne représentant que 50% desdites recettes depuis 2019. (4) Sur 1000€ de dépense publique 572€ sont affectés à la protection sociale. (5)

Il paraît donc évident que les recettes et les dépenses de protection sociale doivent faire l’objet d’une attention particulière, ce qui implique une lutte réelle contre la fraude. Ce qui est loin d’être simple d’une part en raison de la complexité législative et de la diversité des prestations, d’autre part en l’absence de réelle volonté, si ce n’est courage, politique. Rappelons qu’en 2017 Emmanuel Macron avait promis un versement social unique remplaçant toutes les allocations, promesse manifestement oubliée.

La loi de finances de la Sécurité Sociale de décembre 2006 prévoyait la mise en place d’un registre national commun de la protection sociale (RNCPS) recensant toutes les allocations sociales perçues par chaque allocataire. Ce dispositif ne permet actuellement que de consulter le montant des prestations perçues depuis 2020 et seulement celles qui sont imposables (pensions de retraite, rentes d’invalidité non professionnelles, indemnités-chômage, accidents de travail et maladies professionnelles). Les autres montants (les plus importants) devraient pouvoir être consultés progressivement au fur et à mesure de leur intégration. Quelle réactivité depuis 2006 ! 

Il est donc urgent de mettre à jour le RNCPS et d’engager une réflexion sur d’une part le remplacement des prestations sociales non contributives par un versement social unique, d’autre part sur l’assujettissement de ces prestations à l’impôt sur le revenu, ce qui serait un excellent moyen de lutte contre la fraude sans pénaliser les foyers les plus pauvres puisque seuls 44 % des foyers fiscaux sont imposables. 

L’imposition des prestations sociales non contributives permettrait également de rétablir une certaine équité entre ceux qui sont faiblement imposés, sans bénéfice de prestations sociales, et ceux qui ne le sont pas tout en disposant de revenus supérieurs grâce au prestations sociales.

1 Source : Association Contribuables Associés

2 Source INSEE Redistribution monétaire − France, portrait social | Insee

3 En 2019 environ 10 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté monétaire soit 1 012 € (source INSEE)

4 Source Rapport de la Cour des Comptes 4 octobre 2022.

5 Source Agence France Trésor Que financent 1000 euros de dépenses publiques ? | Agence France Trésor (aft.gouv.fr)

Votre commentaire

Choisissez une méthode de connexion pour poster votre commentaire:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s