L’élection présidentielle au suffrage universel direct est un moment particulièrement important de la vie démocratique.
Pour avoir le privilège de se présenter devant les français il faut notamment obtenir 500 parrainages d’élus (1), émanant d’au moins 30 départements, sans dépasser 50 signatures pour une même collectivité afin d’éviter les candidatures visant la défense d’intérêts purement locaux.
42 000 élus sont habilités chacun à parrainer un candidat à l’élection présidentielle : maires, députés, sénateurs, conseillers régionaux et départementaux.
A l’occasion du Congrès des maires, les 16,17 et 18 novembre 2021, plusieurs médias ont interrogé ces derniers sur leurs intentions en matière de parrainage pour l’élection présidentielle de 2022 et environ 30% ont annoncé qu’ils ne donneraient pas de parrainage. Pour mémoire, en 2017, 14 296 parrainages(2) avaient été déposés auprès du Conseil Constitutionnel soit 34 % des élus.
Rappelons également que des dizaines d’élus de gauche, pour protester contre l’éclatement de la gauche et militant pour une union des gauches, ont signé le « serment de Romainville », les engageant à refuser tout parrainage.
Donc au fil du temps nous constatons une frilosité des élus pour accorder leurs parrainages. Une frilosité qui ne peut que s’accentuer pour la campagne 2022 car depuis la loi du 25 avril 2016, les noms et qualité des parrains sont publiés dans leur intégralité et en continu (au moins deux fois par semaine) sur le site du Conseil Constitutionnel.
Certains argumentent qu’un élu tirant sa légitimité du suffrage universel et étant saisi en tant que tel doit la transparence à ses électeurs auxquels il rend des comptes.
C’est bien ce qui chagrine de nombreux maires, particulièrement de petites communes, souvent sans étiquettes, craignant de se mettre à dos leurs électeurs, parfois violemment, de subir des mesures de rétorsion du département ou de la région telle la suppression ou la réduction de subvention sans compter les diverses pressions voire harcèlements possibles de diverses associations s’ils ne sont pas considérés comme étant du « bon côté ».
Nous voyons bien que ce système de parrainages d’élus n’est plus du tout satisfaisant et selon nous pour quatre raisons :
- Il confère aux élus un pouvoir exorbitant au plan démocratique. Lorsque nous élisons un maire ou un député, lui délègue-t-on par la même occasion le droit de décider pour nous qui peut ou non se présenter à l’élection présidentielle ? sans doute pas. Prenons les maires, très souvent ils sont réélus non pour leur étiquette politique mais pour la qualité de leur gestion. Ils seront donc plébiscités par des électeurs de toutes sensibilités politiques. De quel droit vont-ils ensuite décider (ou pas), pour ces mêmes électeurs, quels sont les candidats à l’élection présidentielle pour lesquels ils pourront éventuellement voter ?
- Les élus ayant seuls le pouvoir de parrainer les candidats à l’élection présidentielle, le refus de parrainage est de nature à enrayer le processus de désignation démocratique, il s’agit même d’un déni de démocratie. Ne devraient-ils pas avoir une obligation de parrainage ?
- En raison de la levée de l’anonymat, Il met les élus en très mauvaise posture et les expose même à certains risques dans une société où le lynchage via les réseaux sociaux est monnaie courante et aboutit trop souvent à de la violence physique.
- Il favorise les partis implantés localement. Ainsi pour la campagne 2022, prenons l’exemple du parti socialiste avec Mme HIDALGO, même si les sondages lui donnent moins d’intentions de vote que pour M. MÉLENCHON, Mme LE PEN ou M. ZEMMOUR, elle est assurée de ses 500 signatures, alors qu’ils sont à la peine pour obtenir les parrainages. Est-ce bien démocratique ?
Mais poussons l’analyse encore un peu plus loin. La défiance des citoyens à l’égard du monde politique est notoirement admise et se mesure notamment à l’aune de l’abstention lors des dernières élections. En 2017, une partie des électeurs de droite ont considéré que la présidentielle leur avait été « volée » par l’activisme du parquet financier (affaire FILLON).
Supposons qu’en 2022 des candidats tels que ceux cités ci-dessus, lesquels représentent incontestablement une part relativement significative de l’électorat, n’obtiennent pas les 500 signatures, que se passera-t-il ? A minima une aggravation de la crise démocratique (rejet de la politique, abstention) et au pire la constitution du terreau d’une crise insurrectionnelle.
C’est pourquoi notre équipe lance un appel à tous les élus pour que, indépendamment de leurs convictions, ils se portent garants du bon fonctionnement démocratique de cette élection en permettant à tous les candidats de se présenter à la sanction du suffrage universel : un électeur acceptera toujours de voir son candidat ne pas être élu mais il ne supportera pas de ne pas avoir eu la possibilité de voter pour lui en raison d’un défaut de parrainages d’élus.
Pour la présidentielle de 2027, nous proposons d’envisager la modification de ce système de parrainage :
- Rétablissement de l’anonymat des parrainages.
- Réduire à 100 le nombre de parrainages d’élus et y adjoindre la collecte de signatures de soutiens (ex : 100 000) émanant de citoyens répartis dans au moins 30 départements.
1-Avant 1976 le nombre de parrainages requis était de 100. L’augmentation à 500 vise à limiter le nombre de candidats. En effet, un trop grand nombre de candidats complexifierait particulièrement le partage des temps de parole.
2-Soit 400 de moins qu’en 2012.
Entièrement d’accord avec votre article. Il faut rétablir absolument l’anonymat des parrainages pour écarter la « frilosité » de certains maires, sentiment qui peut se comprendre et qui a été envisagé et même prévu volontairement à travers la loi de 2016 en vue de nuire à certains partis. Bien entendu, comme vous le dites, il faudrait également réduire le nombre de parrainages néces-saires en y adjoignant un nombre raisonnable de soutiens de la part de citoyens pour éviter les candidatures « farfelues » qui ne font que décrédibiliser et encombrer la campagne électorale et peut être réencourager un retour vers les urnes.
Merci à vous et bon courage pour la suite.
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Les électeurs doivent pouvoir voter pour le candidat de leur choix, sans qu’il y ait un barrage émanant d’ élus jouant aux censeurs. La démocratie est le gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple, enfin je crois !! La France doit comptabiliser le nombre d’ abstentions le plus important de l’ Europe pour les échéances électorales. Ce n’ est pas en empêchant un candidat de se présenter que l’ abstentionnisme régressera.
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