Permis de squatter en toute impunité


L’actualité de ces derniers mois s’est emparée d’une affaire de squat d’une résidence secondaire, d’un couple de retraités lyonnais démunis et impuissants pour récupérer « leur propriété » suite à un « Vide Juridique », qui les a engagés dans des démarches irréalistes. 

Des squatteurs ont pris possession des lieux avec leurs deux enfants allant même, jusqu’à souscrire « un contrat d’électricité ».

Cette affaire a provoqué le tollé général de tout un village qui s’est mobilisé pour attirer l’attention des médias et retentir à l’échelon national. 

La lourdeur des démarches procédurales plonge souvent les propriétaires dans le désarroi qui décide souvent de se faire justice eux-même sans réfléchir aux conséquences : « être condamnés pénalement pour « violation de domicile », en l’occurrence, le leur ! 

La loi est ainsi faite : « le propriétaire encourt trois ans de prison et 30 000 euros d’amende s’il reprend possession des lieux par la violence »

Sensible  à toutes les affaires qui se sont succédées depuis des années sur le sujet, le député d’Eure-et-loir, Guillaume Kasbarian , a réagi en présentant un amendement « anti-squatteurs » compilé dans l’article 30 TER de la loi ASAP de simplification de l’action publique. Les procédures d’expulsion accélérées s’étendent désormais à tout type de logement (résidence principale, secondaire ou occasionnelle ) afin de protéger « la propriété privée ».

Cet amendement rajouté à la loi Dalo a été adopté à l’unanimité par les députés le 17 septembre 2020.

La médiatisation de cette affaire n’a pas été sans effet sur le législateur qui a précipité la promulgation de la loi ASAP,  entrée en application le 7 Décembre 2020.

Mais qui sont les squatteurs ? 

On parle de squatteurs  lorsque « une ou plusieurs personnes se sont introduites dans un logement sans l’autorisation de son propriétaire », soit par effraction  après avoir forcé une serrure ou cassé une fenêtre par exemple, ou par tromperie (menace ou violence) . Cet acte relève du « délit pénal 

Les personnes qui occupent les lieux « illégalement » sont considérées par la loi comme « des occupants sans droit ni titre ». 

Attention, n’est pas considéré « squatteur » par le code pénal, le locataire qui continue à occuper un logement après expiration de son bail, dont la procédure d’expulsion relève de l’action civile.

Aspect juridique, avant la loi ASAP

Pour la Cour de cassation c’est « le droit de propriété »  qui l’emporte sur le droit au logement et à la vie familiale pour lequel la Cour Européenne est plus favorable.

S’agissant d’une résidence secondaire, la question est de savoir « quel droit » doit prévaloir :

☞Le droit de propriété, « inviolable et sacré » selon l’article 17 de la Constitution ou, 

Le droit au logement,à la vie privée et familiale, protégé par l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

 L’occupation sans droit ni titre d’une habitation dans laquelle une ou plusieurs personnes se sont introduites par « la force » prime-t-elle sur le droit « de jouir et disposer des choses que l’on possède de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé, par la loi ou les règlements » (article 544 du Code civil) ? 

Non, a dit la Cour de cassation par décisions rendues respectivement les 4 juillet et 28 novembre 2019, estimant que « le droit de propriété »  devait primer «  sur le droit à la protection du domicile des squatteurs», et donc sur le droit au logement. 

Les voies de recours :

Cette infraction pénale est sanctionnée par des «  procédures  d’expulsion, en fonction du type de logement occupé », et des « pénalités » pour les squatteurs, mais aussi pour les propriétaires

La loi est claire « nul n’est tenu de se faire justice soi-même ». Si le propriétaire contrevient à cette règle le squatteur peut porter plainte contre lui pour…. « violation de domicile ». le propriétaire ne peut donc intervenir, et doit se soumettre au respect de la procédure. Tenter Une évacuation forcée sans le concours de la force publique est également un délit pénal (article 226-4-2 du Code pénal)

Les procédures d’expulsion 

a – Si le lieu occupé concerne « une résidence principale », Les propriétaires bénéficient d’une procédure accélérée d’expulsion, encadrée par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, connue sous le nom de loi Dalo (droit au logement opposable), ordonnée par le Préfet qui met en demeure les Squatteurs. 

b –Si le lieu occupé, concerne « une résidence secondaire », les propriétaires doivent se tourner vers la procédure dite classique qui peut  prendre plusieurs mois, voire plusieurs années (articles L411-1 et L412 du Code des procédures civiles d’exécution). Les propriétaires ne bénéficient pas de la procédure accélérée d’expulsion conformément à L’article 102 du Code civil qui précise «  le domicile de tout Français est le lieu où ce dernier établit « sa résidence  ». Chaque individu ne peut alors avoir qu’une seule résidence principale qui est référencée dans l’article 226-4 du Code pénal qui sanctionne l’occupation illégale.

Mise en œuvre de la procédure 

Le propriétaire ou le locataire doit au préalable, porter plainte pour violation de domicile au commissariat de police ou à la gendarmerie, prouver que le logement est son domicile et ensuite, faire constater à un officier de police judiciaire que le logement est squatté


Lorsqu’un délit d’occupation illégale est relevé sur le lieu d’habitation,  la procédure classique est appliquée. Dans les 48h suivant le début de l’occupation illégale (flagrant délit) : les forces de l’ordre peuvent procéder à l’expulsion des squatteurs, Passé ce délai :

– un huissier doit se déplacer pour dresser un constat d’effraction, 

– Les propriétaires doivent déposer une requête devant le Tribunal judiciaire, l’audience est communiquée aux squatteurs par voie d’huissier. Après l’audience, l’occupant illégal devra évacuer les lieux dans les délais exigés par le juge.

Ce n’est qu’à échéance de ce délai, que les forces de l’ordre pourront procéder directement à l’expulsion des squatteurs.

Ces démarches en cascade « inapropriées » et qui s’échelonnent sur des délais incompressibles, profitent aux squatteurs au grand dam des victimes qui ne peuvent que subir  « l’injustice des procédures ».

Cet état de fait a nécessité « le vote d’un amendement anti-squat » dans le cadre de la Loi ASAP afin de « renforcer la procédure d’expulsion et à faciliter l’accès aux services publics» qui n’est plus désormais réservée à la seule résidence principale du propriétaire ou du locataire. 

Apport de la loi ASAP :

Renforcement du dispositif « anti-squat

sanction pénale plus sévère à l’encontre les squatteurs, qui encourent désormais 3 ans d’emprisonnement (contre 1 an précédemment) et 45.000 € d’amende (contre 15.000 €). Il apparaît nécessaire de durcir la répression à l’égard des auteurs de violation de domicile”, justifient les rapporteurs de l’amendement.

☞Autre avancée sur les délais des procédures d’expulsions qui seront également revus. Les préfets dispose désormais d’un délai de 48 heures (contre aucun délai réglementaire auparavant) pour répondre à une demande de mise en demeure d’un squatteur, et devront exécuter “sans délai” l’expulsion à l’issue de l’ultimatum de 24 heures laissé au squatteur.

le préfet peut également :

être saisi « par toute personne dont le domicile est ainsi occupé » ou « toute personne agissant dans l’intérêt et pour le compte de celle-ci »

▹refuser de mettre en œuvre cette procédure. Cette possibilité est toutefois subordonnée à la méconnaissance des conditions de mise en œuvre ou à l’existence d’un motif impérieux d’intérêt général qui peuvent amener le préfet à ne pas renoncer à la mise en demeure. Le refus du préfet doit être motivé sans délai au demandeur

Une réalité aberrante se cache derrière « le nouveau » pouvoir du Préfet, qui n’est pas la faveur des propriétaires, comme on a pu le constater récemment à Marseille, où  la procédure d’expulsion n’a pu être appliquée dans la demeure familiale d’un couple marseillais « de nouveau » squattée, par une trentaine d’individus pendant plus d’un an

(portail de la demeure des Sifredi, encombrés par des tas de détritus apportés par les squatteurs et abandonnés à même le sol.) Caroline Caussé

 Le Préfet s’est déjugé en invoquant «la vulnérabilité de ce public et les risques de troubles à l’ordre public s’ils étaient expulsés», dixit la préfecture des Bouches-du Rhône, contactée par Le Figaro. L’expulsion «n’est pas prévue avant la fin de la trêve hivernale (qui prend fin le 1er juin prochain après une prolongation de deux mois) et interviendra en tenant compte de la crise sanitaire et du calendrier académique des enfants scolarisés présents sur le site».

Une course effrénée pour leur avocate qui a engagé depuis, deux recours judiciaires, trois recours contre l’Etat, une procédure en référé administratif et une saisie au Conseil d’Etat (source le figaro du 27 Janvier 2021)

Si la loi ASAP prévoyait une meilleure protection des propriétaires, il n’en demeure pas moins que ce cas inédit n’est pas sans inquiéter les propriétaires qui n’ont aucune assurance d’obtenir le feu vert du préfet, lui-même démuni juridiquement pour faire face à ce type de situation qu’il n’a pu anticiper. 

Ces mesures profitent de nouveau aux squatteurs qui en jouent et usent de la complexité des procédures pour repousser les échéances d’expulsion.   

Les squatteurs protégés, comment on en est arrivé là ?

Plus généralement, « c’est le droit au logement », qui permet aux squatteurs de ne pas être délogés. Pour ne pas « froisser » les associations, le gouvernement a décidé qu’une expulsion devait être accompagnée d’une solution de relogement. Mais la plupart du temps, les dossiers traînent en longueur. «L’État fait financer par des particuliers une politique publique (loi du droit au logement opposable)», dénonce Caroline Caussé

la présence d’enfants en bas âge constitue également un obstacle. «Nous prenons souvent en compte le profil des squatteurs avant de les expulser ou pas, confie au Figaro un commissaire de police parisien. L’expulsion sera immédiate pour des personnes qui cherchent, par exemple, à se cacher de la police. En revanche, s’il s’agit d’une femme seule avec des enfants en bas âge, l’expulsion sera plus délicate».

Force est de constater que la procédure d’expulsion accélérée ne présente aucune garantie au propriétaire de récupérer aussi rapidement son logement . En cas de refus du Préfet, c’est même « retour à la case départ » de la traditionnelle procédure longue et coûteuse ». Une vraie galère pour des propriétaires qui ont souvent des crédits à rembourser, des frais, des charges et des taxes à payer pour un logement qu’ils n’occupent plus. Sans oublier les frais de remise en état des lieux dégradés par les squatteurs. «Certains propriétaires à bout de souffle ont l’impression d’être abandonnés ». La nouvelle loi ne changera rien. C’est de la poudre aux yeux!», lâche Me Plaisant

Afin de renforcer les mesures existantes, nous proposons :

suppression du délai pour déclarer le squat

Contrôle en amont de  tous les squatteurs présent sur les lieux,  afin de dresser un état des lieux qui permet au Préfet d’adapter les mesures d’expulsion en fonction du nombre, de leur situation familiale et de leur nationalité.

pour les squatteurs issus de l’un des pays membres de l’Union Européenne, s’assurer du respect des règles qui régissent « les droits et obligations  de la libre circulation » en vérifiant :  « la validité de leur droit au séjour », « leurs ressources » et « leur protection sociale » ; conditions sinequanone pour séjourner dans le pays d’accueil durant le séjour.

– application de la « procédure d’éloignement » de l’État membre d’accueil, y compris des membres de leur famille » en cas d’irrégularité constatée aux principes de séjour, ou de troubles causés à l’ordre public, la sécurité ou la santé publique, en s’assurant au préalable que la procédure respecte le principe de proportionnalité et se fondent, entre autres, sur le comportement de l’individu

pour les squatteurs issus de pays étrangers en situation irrégulière, retour à la frontière sans délai

Suppression des pénalités qui ne seront jamais recouvrées, et les substituer par « des travaux d’intérêts généraux » 

Création « un fonds d’indemnisation » pour les victimes, afin de contraindre l’Etat  à protéger davantage ses citoyens en prenant à charge le coût des procédures et de remise en état de leur propriété » 

surseoir « au nouveau  pouvoir unilatéral» du Préfet et maintenir les procédures d’expulsions quelles que soient les circonstances 

.

1 commentaire

  1. Entièrement d’accord avec les propositions de VOX NOSTRA. Les expulsions des domiciles squattés doivent être systématiques, judiciaires et sans délai. Le principe des travaux d’intérêts généraux doit être mis en place ainsi que le fonds d’indemnisation pour les propriétaires qui doivent reprendre possession de leur bien la plupart du temps dans un triste état.

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